Vernissages...La chanson de GUSTAVSON en écoute
Un tournage à l'opéra, je n'en avais jamais vu. L'opéra, c'est le truc bourgeois par excellence. Qui va à l'opéra ? Les bourges, les riches, ceux dont la culture les amène à y aller. Moi, rien ni
personne ne m'avais incité à aller dans un opéra, jusqu'à ce jour. De la même manière, je n'ai jamais vu de théâtre de ma vie, croire que je suis le seul est se tromper lourdement, rien qu'en
France, je pense que trois quart de la population n'a jamais vu de théâtre, ou n'est jamais entré dans un opéra.
Cette fois j'y étais et ce lieu se parait de ses plus beaux décors rococos. Des dorures, des petites statues collées aux murs, l'étalage du luxe sur fond de moquette rouge, tout pour nous
rappeler qu'ici, on est chez les bourges.
Je suis venu visiter ce lieu, pour appréhender la manière dont se passe un tournage et on m'a collé en figurant. Normalement figurant, c'est un truc à la con sans conséquences, tu te fou là, tu
fais ce qu'on te dis, un truc simple et c'est dans la boite. J'allais vite me rendre compte que c'était bien là mon problème. Faire ce qu'on me dit, sans rien n'y comprendre...C'est ce que la
société et son système de fonctionnement que je décrie, demande de faire à la masse des manipulés inconscients. Je me trouve dans un opéra, antre des dominants dans leurs amusements culturels
élitistes et on mêle l'art à tout ça.
Sur le coups, je n'avais pas compris les choses comme ça, j'étais juste pas bien, sans en comprendre la raison, je ne m'expliquais pas pourquoi je n'arrivais pas à faire une chose si simple, de
la figuration. Il fallait que je retienne un numéro et lorsque celui-ci était appelé, il fallait que j'allume un briquet en souriant, fixant un espace entre deux cintres...Pourquoi ? Dans quel
but ? Aucun figurant ne le savait, les figurants ne sont pas là pour penser, pour réfléchir, ils sont là pour faire ce qu'on leur dit, comme de bons toutous obéissants. Dans la vie quotidienne,
c'est pareil, on vit dans une société de figurant, jonchée de pions dirigés sans comprendre pourquoi ils vont ou ils vont. Ils ne sont pas acteur, ils figurent, tiennent leur place et ont un rôle
semblable à tant d'autres.
La lumière s'éteint, une caméra s'avance sur un rail dans l'obscurité, une ombre s'approche et un vieux con crie "un....deux....trois", les briquets s'allument alors avec difficulté et les
sourires coincés fleurissent "6...7...8...9"...Neuf, c'est à moi, j'allume mon briquet, je regarde les cintres, je souris, mais je me force, ma joue en tremble alors j'arrête de sourire, mon
corps refuse de sourire, ça n'est pas une situation pour sourire, rien ne m'a donné envie de sourire. Je n'ai pas réussi à changer mon "état d'humeur", j'étais horrifié, j'ai essayer de forcer
mon corps à accepter une contrainte absurde, mais il ne m'a pas laissé faire et je fus contraint de revenir à un état plus naturel pour moi, à ce moment là, l'état horrifié. Si j'avais compris le
film, le pourquoi de cette scène, son intérêt dans l'œuvre, j'aurais peut-être pu accepter l'idée de sourire en regardant des putains de cintres et en allumant un putain de briquet dans le noir.
Ca n'est pas naturel de sourire dans cette situation, mais en comprenant, on en appréhende l'intérêt. Alors on va peut-être me répondre que c'est une question de temps, que l'on ne peut pas
expliquer tout à tout le monde. Ben si, la moindre des personnes participant à un projet, son rôle fusse t-il minime, doit le comprendre, le projet doit lui être expliqué. En démocratie, on doit
expliquer le fonctionnement des institutions et les enjeux de tels ou tels votes à tous. Aujourd'hui, ce sont les figurants qui votent sans comprendre les projets, les figurants qui figurent sans
comprendre les enjeux de leur scène et du film dans lequel ils participent. Expliquer, rendre compréhensible, en société ou dans un film, c'est possible pour la masse de ceux qui ne joueront pas
un rôle principal, ça donne à leur participation un sens plus fort que celui de statues dirigées, ça rend le film plus crédible...
En résumé, je pense que le rôle de figurant qui doit faire des choses sans les comprendre ne me conviens pas, ni dans la comédie, ni dans la société. Si l'on essaye de me faire jouer ce genre de
rôle, il génère chez moi, un état horrifié, dicté instinctivement par mon corps, dont je ne peux me détaché qu'en acceptant de aire autre chose...que de la figuration.